Culture : La Mairie de Goma annule le Festival Amani, les opérateurs culturels pas contents.

Ce mercredi 13 novembre 2024, le monde culturel de la ville de Goma, de la RD Congo et d’ailleurs se réveille avec une très mauvaise nouvelle. Le festival Amani est annulé. A la base, un communiqué officiel de la mairie de la ville de Goma. Selon ce communiqué portant le numéro 3072/48/M-G/2024, le Maire de Goma, le Commissaire Supérieur Principal Kapend Kamand Faustin est informé de la tenue d’une série de manifestations populaires projetées à partir de ce mercredi 13 novembre organisées par le mouvement Citoyen MNC, Mouvement National Congolais pour demander l’annulation immédiate du Festival Amani qui devra avoir lieu dans la vile de Goma du 15 au 17 novembre 2024.

Le communiqué stipule que la mairie de Goma n’étant pas informée d’une quelconque velléité sur l’organisation d’une activité culturelle, le Festival Amani n’est pas autorisée au lieu et date prévus par les organisateurs pour des raisons d’ordre sécuritaire. Le communiqué annule par la même occasion la marche prévue ce 13 novembre par le mouvement National Congolais.

Une décision qui ne laisse pas indifférents les opérateurs et acteurs culturel de la région.

Djo Ngeleka, Directeur de la Compagnie La Seringu’art de Lubumbashi et du Festival de Lubumbashi pense l’art et la culture sont des piliers essentiels au développement d’une société. Ils transmettent les valeurs, renforcent l’identité collective et agissent comme un puissant vecteur d’impact social. Cependant, dans notre société, l’art est trop souvent perçu comme la « cinquième roue de la voiture » : un domaine secondaire, presque accessoire, alors qu’il est un moyen fondamental pour toucher les âmes et transformer la société.

« Au-delà de l’importance sociale de l’art, il est crucial de se rappeler que l’art est créé et pratiqué par des êtres humains. C’est un art « des humains pour les humains », et donc, l’humain doit rester au centre de toutes les décisions qui le concernent ».

C’est un acte  regrettable, estime Djo Ngeleka. Le festival Amani, initialement prévu en février dernier, a été reporté à novembre 2024, soit neuf mois après la date prévue. Ce report laissait supposer que des discussions approfondies avaient eu lieu entre les organisateurs et les autorités locales pour assurer la sécurité de l’événement. La sécurité de la population est, bien entendu, primordiale. Toutefois, il est surprenant et même irresponsable que les autorités locales décident d’annuler cet événement à la dernière minute.

Goma est une ville qui a connu et continue de connaître des instabilités. Chaque édition du festival Amani est un véritable défi, tant pour les organisateurs et les autorités que pour le public, local et international, et pour la population de Goma elle-même. Malgré les difficultés, ce festival est devenu un symbole de résilience pour la ville. Il incarne la vie, l’espoir et la force de Goma. En annulant un tel événement, on risque de briser cette dynamique qui, chaque année, permet aux habitants de se rassembler autour de la culture et de l’espoir.

Bien que le contexte sécuritaire soit délicat, reconnaît Djo Ngeleka, il est du devoir des autorités de trouver des moyens de maintenir cet événement en renforçant les mesures de sécurité autour du festival. Annuler un festival aussi près de son ouverture, alors que tant de préparation et de logistique ont été mises en place, manque de considération pour le travail des organisateurs et l’enthousiasme du public. Le festival en soi ne représente pas une menace, même si le nombre de personnes qu’il rassemble pose des défis. La sécurité devra être un enjeu à renforcer, et non une raison d’annulation.

Didy Ramazani, Directeur de la compagnie les Erudits de Goma minimise une menace provenant d’un mouvement citoyen de moindre importance. Selon lui, Le festival Amani est une manifestation célébrant la culture et son pouvoir dans une région instable. Cet événement, explique – t – il,  a pour objectifs de sensibiliser la communauté à la tolérance et à la cohabitation pacifique. Annuler cet événement  sur fonds des revendications d’un mouvement se disant apolitique reviendrait à politiser un événement culturel et à tendre une situation sécuritaire qui l’est déjà.

Mwami Balan, humoriste et Directeur du Festival « Goma rire Festival, pense que l’annulation de ce Festival, C’est le plus grand choc pour le secteur culturel de la ville de Goma. C’est une régression que la ville va connaître dans le secteur culturel. Pour lui le danger, c’est renforcer la perception des bailleursselon laquelle ils ne peuvent pas investir dans la ville Goma.

« Si le Festival Amani peut être annulé deux fois de suite, je ne vois que le chaos. Je suis tellement choqué, mais je reste convaincu que les autorités vont faire un pas en arrière pour rasseoir cette décision. Toutefois, je suis en train de comprendre que, les culturels doivent sensibiliser la population en leur montrant c’est quoi l’importance de la culture dans une période de crise. Les culturels doivent sensibiliser les autorités sur le rôle de la culture et les arts dans une période comme ce que traverse la ville de Goma ».

Il faut dire que le Festival Amani est ces derniers temps au centre de l’actualité culturelle dans la région des Grands Lacs. L’année dernière, il avait été délocalisé pour la ville  Bukavu. Cette année, il a connu déjà un report au mois de février, date fixée  initialement pour sa tenue.

Cette décision qui survient à 24 heures de son lancement, met en mal et les organisateurs, les animateurs et la population de Goma. Nos sources nous signalent que déjà plusieurs délégations ont commencé à fouler le sol gomatracien depuis le mardi 12 novembre. Déjà ce mercredi matin, le groupe Jet 7 de ferré Gola a été aperçu à l’aéroport international de Ndjili attendant son embarquement pour Goma.

Selon certain médias, malgré cette interdiction, les organisateurs continuent de mobiliser pour la tenue de l’événement, qu’ils considèrent essentiel pour promouvoir la paix, la culture et la cohésion sociale dans la région. Des artistes, qui prévoient eux-mêmes des actions de soutien, estiment que l’annulation entraînerait des pertes financières significatives et nuirait à l’image de Goma. “Les budgets sont déjà engagés”, signalent ils, rappelant que le festival attire chaque année des milliers de visiteurs et offre une plateforme aux jeunes talents locaux.

A Djo Ngeleka de conclure : L’annulation du festival Amani est une décision regrettable qui pourrait démoraliser les habitants de Goma et affaiblir l’image d’une ville qui tente de se relever. Plutôt que d’éteindre cette lumière, les autorités devraient se joindre aux organisateurs pour trouver des solutions durables qui garantissent la sécurité sans priver la population de cet événement vital.

La Rédaction